Le Che en toute intimité
La photo, prise par le cubain Alberto Korda, est intitulée Guerrillero Heroico, mais qui le sait ? Allure romantique, regard profond, cheveux longs coiffés de son célèbre béret étoilé : le récit de ce cliché mondialement connu, réalisé lors d'un cortège de rue à la Havane en 1960, est l'une des étapes de "Le Che en toute intimité", le documentaire qu'Arte a consacré à Ernesto "Che" Guevara, s'appuyant notamment sur les témoignages aussi rares qu'essentiels de son fils, de son frère et de ses plus proches camarades de combat. Des films et photos d'archive peu ou pas connus agrémentent le propos.
Il existe bien des documentaires sur le Che mais peu abordent la vie familiale et personnelle du révolutionnaire d'Amérique latine, et surtout comment et en quoi celle-ci a influé sur son parcours militant, du début à la fin. Ainsi, c'est chapeauté par sa première épouse, communiste, qu'il bascula dans le militantisme actif et l'engagement complet. Ce documentaire, qui ne cède pas à l'admiration facile malgré un ton général bienveillant, nous rappelle que, au-delà de la générosité et de la sincérité des idéaux, le Che eut aussi à l'occasion une approche que l’on peut qualifier d’expéditive de la justice révolutionnaire. Diffusé en février 2021 sur Arte, ce film est désormais visible sur Youtube.
Compléments de lecture
- OpenEdition (revues en SHS, libre accès)
Maguet Frédéric, « Le portrait de Che Guevara », Gradhiva, 2010/1 (n° 11), p. 140-161.
Dès la mort du Che en 1967, ce portrait est massivement diffusé dans l’espace public et devint un symbole de la rébellion en général, disponible pour des interprétations contradictoires et des utilisations inattendues. En 2000, l’auteur de la photographie se révèle au grand public. Dès lors, l’image est brusquement réinvestie par un nouveau discours qui impulse une réorientation à sa signification globale.
Bonhomme Julien, Jaoul Nicolas, « Grands Hommes vus d'en bas. L'iconographie officielle et ses usages populaires », Gradhiva, 2010/1 (n° 11), p. 4-29.
Cet article propose d’aborder les images des grands hommes sous une perspective inédite. Par contraste avec les analyses déjà nombreuses consacrées à l’iconographie officielle, il s’agit de décaler le regard pour examiner comment la figure des hommes d’État fait l’objet d’appropriations qui échappent au registre de l’officiel tout en prenant appui sur lui. Ce changement de perspective permet de saisir les grands hommes non plus « par le haut », tels qu’ils se donnent à voir dans leur grandeur officielle, mais « par le bas », du point de vue des acteurs subordonnés.
- Cairn (revues en SHS, abonnés UA)
Pedemonte Rafael, « Comment faire la révolution en Amérique latine ? Les communistes chiliens face à la révolution cubaine (1959-1970) », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, 2018/4 (N° 140), p. 109-121.
Le triomphe castriste de 1959 vient ainsi élargir les modèles de lutte sociale, offrant une option insurrectionnelle séduisante, que les autorités cubaines, inspirées par la pensée de l’Argentin Ernesto Guevara, synthétisent dans la notion de foco (foyer). Mais bien que de nombreux rebelles latino-américains, séduits par la possibilité de précipiter la révolution dans leur pays suivant le modèle du mouvement de la Sierra Maestra …, s’engagent dans la lutte armée, il ne faudrait pas exagérer l’importance de la référence cubaine dans l’évolution de l’ensemble du marxisme latino-américain. Certes l’exemple de l’île héroïque suscite un énorme enthousiasme, mais certains secteurs de gauche regardent l’expérience cubaine d’un œil prudent…
Bataillon Gilles, « Ernesto Guevara, héros révolutionnaire et apologiste du pouvoir de l'égocrate », Problèmes d'Amérique latine, 2010/3 (N° 77), p. 59-80
(…) si ce culte à Guevara paraît solidement ancré dans toute une partie de la jeunesse et de la gauche, des critiques à l’encontre du rôle de Guevara dans la construction du nouvel appareil d’État cubain ont néanmoins vu le jour, à la fois dans les biographies d’Anderson et de Castañeda, et plus encore dans des pamphlets comme ceux de Jacobo Machover et de Pierre Rigoulot. Il est vrai que tant Anderson et que Castañeda, ses deux meilleurs biographes racontent chacun de façon convaincante et détaillée ce que fut la justice sommaire pratiquée dans la Sierra par la guérilla et le rôle qu’y joua Ernesto Guevara. Ils évoquent sans fard son rôle dans l’application des peines de mort prononcées par la « justice révolutionnaire » dans la forteresse de la Cabaña où sont emprisonnés les détenus accusés d’avoir commis différents crimes durant la dictature batistienne.
Association Cuba Coopération France. Le fameux béret de Che Cuévara ! Le légendaire béret de Che Guavara a été fabriqué en France, dans les ateliers béarnais de Laulhère (Oloron). (janvier 2021)