Prix Nobel Alternatif de littérature décerné à Maryse Condé
La Nouvelle Académie, collectif de 109 écrivains suédois qui s’est constitué suite au scandale qui a frappé l’Académie suédoise l’année dernière, a remis ce vendredi 12 octobre, à Stockholm, le prix Nobel alternatif (The New Academy Prize in Literature 2018) à l’écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé.
Son œuvre « décrit avec précision les ravages du colonialisme et le chaos post-colonial, dans une langue qui mêle également la magie, le rêve, la terreur et l’amour », a souligné La Nouvelle Académie dans un communiqué. « Les Français n’ont jamais voulu entendre la voix de la Guadeloupe. Je suis heureuse qu’enfin, cette voix singulière soit reconnue. Je dédie ce Prix Nobel à mon mari, ma famille, à la Guadeloupe et à tous ceux qui me lisent », a réagi Maryse Condé suite à l’annonce de son prix.
Si l’écrivaine a remporté de nombreuses distinctions au cours de sa carrière (prix de l’Académie française pour La Vie scélérate en 1988, Légion d’honneur pour l’ensemble de son œuvre en 2014), ce prix Nobel alternatif vient consacrer l’une des plus belles voix de la littérature caribéenne contemporaine. Exigeante et engagée, attentive à la condition de la femme aux Antilles, en Afrique, aux Etats-Unis comme dans le reste du monde, Maryse Condé a publié plus de trente ouvrages depuis Heremakhonon (1976) jusqu’au Fabuleux et Triste Destin d’Ivan et d’Ivana (2017).
La sélection du lauréat s’est déroulée de manière originale par rapport aux pratiques habituelles de l’Académie suédoise : les bibliothécaires de Suède ont d'abord établi une liste d'auteurs, pour lesquels 32 000 lecteurs du monde entier ont ensuite pu voter par internet. La Nouvelle Académie sera dissoute dans les jours suivant la remise du prix en décembre : l’Académie suédoise doit se reformer en 2019 pour attribuer à nouveau ses prix Nobel. Le prix, une bourse d’un million de couronnes suédoises (environ 100 000 euros), sera remis à Maryse Condé lors d’une cérémonie qui aura lieu en Suède le 9 décembre prochain.
Les bibliothèques de l’Université des Antilles vous proposent ci-dessous une sélection de documents sur Maryse Condé que vous pourrez retrouver en rayons ou en ligne.
OpenEdition - revues en SHS (libre accès)
- Ana Paula Coutinho, « D’une île à l’autre : enjeux de la créolité au féminin », Carnets [En ligne], Deuxième série - 3 | 2015
Partant d’une réflexion sur l’absence des femmes – soit comme sujet, soit comme objet ou comme point de référence – dans la plupart des textes fondateurs de la créolité, nous adoptons une perspective transversale pour relever les principaux enjeux qui, à leur tour, fondent la prise de la parole littéraire de femmes migrantes entre différentes îles, physiques et symboliques. Pour ce faire nous appelons à des exemples puisés chez quelques écrivaines des Antilles françaises - Simone Schwarz Bart, Maryse Condé et Gisèle Pineau...
- Gloria Nne Onyeoziri. L’ironie et le fantastique dans Traversée de la mangrove de Maryse Condé. In Nouvelles écritures francophones, Presses de l'Université de Montréal, 2001. p.404-419.
Dans Traversée de la mangrove, Condé n’hésite pas à avoir recours à différents procédés reliés à l’ironie, tels que le fantastique, le discours polyphonique et le signifiant culturel polysémique, pour présenter une réalité historico-culturelle qui dépasserait tout historien, politicien ou sociologue, créolophone ou non. Toute prétention de pouvoir reconstituer, de façon objective, l’identité, l’histoire et la mort de Sancher, et par-delà, l’histoire de la Guadeloupe, des Antilles, risque non seulement d’induire en erreur mais aussi de réduire l’histoire, la culture et les liens spirituels des peuples représentés.
- Nicolas Treiber, « Maryse Condé, La Vie sans fards », Hommes & migrations, 1298 | 2012,
Comme Diogène cherchant un homme dans les faubourgs d’Athènes, Maryse Condé cherche l’Afrique. Côte d’Ivoire, Guinée, Ghana, Sénégal… Une décennie de billets d’avion ponctuant un parcours chaotique en terre africaine. Dans cette autobiographie sans concession, Maryse Condé s’épargne poudre aux yeux et autres artifices pour livrer le récit taillé jusqu’à la moelle du début de sa vie d’adulte, de femme, de mère, et d’écrivain.
- Marie Poinsot et Nicolas Treiber, « Entretien avec Maryse Condé », Hommes & migrations [En ligne], 1301 | 2013,
Les Antillais sont allés en Afrique pour des raisons diverses. À l’époque, le chômage sévissait depuis très longtemps aux Antilles. Sans travail, la population est donc heureuse de voir l’ouverture de ces postes, de ces opportunités en Afrique. Les Antillais ne se rendaient pas toujours sur le continent avec l’envie d’aider la population locale. Ceux qui ont vraiment eu envie d’aider sont allés dans des pays comme la Guinée, où il y avait une révolution en cours, mais ceux qui sont partis au Bénin, au Dahomey, en Côte d’Ivoire avaient d’abord envie de gagner leur vie. Ils ont été recrutés pour pallier l’exode des enseignants et des fonctionnaires français d’une part, et pour répondre à la création parallèle d’écoles, de lycées et d’universités dans les pays nouvellement indépendants d’autre part. La fuite des cerveaux européens a suscité une nouvelle demande de cadres dans les pays indépendants. Les Antillais sont donc arrivés dans ce contexte, sans trop savoir ce qui les attendait, n’ayant pas d’idées précises sur l’Afrique, en pensant en revanche que les Africains leur étaient inférieurs
Thèses.fr - (Thèses en ligne - libre accès)
Identité créole et écriture métissée dans les romans de Maryse Condé et Simone Schwarz-Bart. Mouhamadou Cisse. Thèse de doctorat en Arts et Lettres, Université Lyon 2, 2006.
L’orientation littéraire de ce travail s’articule selon les caractéristiques de l’identité créole, mais aussi de l’écriture métissée, dans les romans de Maryse Condé et Simone Schwarz-Bart, deux auteurs issus du même contexte culturel, social et géographique, celui des Antilles. Héritières rebelles de la Négritude d’Aimé Césaire, elles procèdent à une relecture des particularismes créoles, dans une création littéraire beaucoup moins théorique que l’Antillanité d’Edouard Glissant, en reprenant à leur compte la parole créole « marquée » de Patrick Chamoiseau.