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George Lamming (1927-2022) «Quintessentiellement Barbadien!»

George Lamming, qui s’est éteint samedi 4 juin, était «Quintessentiellement Barbadien!» selon le mot de Mia Mottley.
George Lamming en 1988

George Lamming qui s’est éteint samedi 4 juin, à quelques jours de son quatre-vingt quinzième anniversaire, était «Quintessentiellement Barbadien!» selon le mot de la Première Ministre Mia Mottley, mais c’était aussi un des plus grands écrivains de langue anglaise de sa génération.

George Lamming est né le 8 juin 1927 dans un petit village de l’est de Barbade. Grâce à une bourse, il suit ses études secondaires à l’école Combermere, l’une des plus anciennes de la Caraïbe et la plus prestigieuse de Barbade. Il y rencontre Frank Collymore qui, en plus de son activité d’enseignant, fut aussi l’éditeur du premier magazine littéraire de la Caraïbe anglophone Bim. C’est lui qui encourage le jeune Lamming dans ses premiers essais littéraires.

En 1946, Lamming quitte Barbade pour Trinidad où il enseigne dans un pensionnat, puis il émigre vers l’Angleterre avec son ami Samuel Selvon. En Angleterre, il travaille d’abord dans une usine avant de devenir présentateur au BBC Colonial Service. Il publie alors ses premiers écrits dans Bim et ses premiers poèmes font l’objet d’une diffusion dans l’émission « Caribbean voices » de la BBC. En tant que présentateur, il lit aussi à l’antenne des textes d’autres auteurs caribéens, notamment des poèmes du jeune Derek Walcott.

En 1953, Lamming publie son premier roman, In the Castle of My Skin (Londres : Michael Joseph, 1953). Il y décrit son enfance et sa jeunesse dans un petit village rural de Barbade pendant l’entre-deux-guerres. Ce livre reçoit un excellent accueil critique et installe son auteur au firmament de la littérature caribéenne. L’édition états-unienne est même préfacée par Richard Wright. Lamming peut alors vivre de son écriture et commencer une série de voyages aux Etats-Unis, dans la Caraïbe et en Afrique. En 1954, paraît son deuxième roman The Emigrants (Londres : Michael Joseph, 1954) qui prend la suite du premier en racontant son arrivée et ses premières années en Angleterre. Cette trilogie s’achève en 1958, avec Of Age and Innocence (Londres : Michael Joseph, 1958) dans lequel il s’intéresse aux problèmes de l’indépendance. En parallèle, il est invité comme enseignant, conférencier ou écrivain résident dans de nombreuses universités des États-Unis, ainsi qu’à l’University of the West Indies. Il doit aussi sa popularité dans toute la Caraïbe à sa participation au programme radio de la BBC « New World of the Caribbean » qui lui permet de se faire connaître dans toutes les îles et de diffuser aussi une nouvelle vision commune de la Caraïbe anglophone.

Il se conformait ainsi à sa vision de l’écrivain dont il disait : « L’écrivain ou l’artiste est, en fait, un citoyen et un travailleur et son rôle social doit être contenu dans le processus de ce travail. Le romancier ou le poète dans une telle société remplit un rôle social de la plus haute importance en écrivant les romans et les poèmes qu’il se sent obligé d’écrire et qui témoignent des expériences de cette société à l’un ou à l'autre de ses niveaux. Une fonction sociale est véritablement remplie si un tel travail contribue à créer une conscience de la société qui n’existait pas auparavant ou pour informer et enrichir une prise de conscience qui n’était pas encore profondément ressentie. ».

Outre sa première trilogie, George Lamming a écrit trois autres romans : Season of Adventure (Londres : Michael Joseph, 1960) dans lequel une afrocaribéenne découvre son héritage africain, Water with Berries (Londres : Longman, 1971), une allégorie politique inspirée de La Tempête de William Shakespeare, et Natives of my Person (Londres : Longman ; New York: Holt Rinehart, 1972) sur les premiers contacts entre Européens et habitants de la Caraïbe. Il est aussi l’auteur de nombreuses nouvelles ayant fait l’objet d’anthologies et de plusieurs essais. Presque toute son œuvre écrite est disponible dans les bibliothèques de l'Université des Antilles en langue originale, car de façon incompréhensible il n'a presque pas été traduit en français.

Depuis plusieurs années il s’était retiré sur son île natale et y avait reçu de nombreuses récompenses, dont l'Ordre de la Communauté Caribéenne qui récompense les personnalités ayant contribué à la création d'une conscience caribéenne au niveau politique ou culturel.