Dans la classe de l'homme blanc

BU Schoelcher : Conférence-débat avec Laurence de Cock mardi 11 février à 19h

Dans la classe de l’homme blanc : L’enseignement du fait colonial en France des années 1980 à nos jours

A l’origine de l’enseignement de l’histoire en France se trouve un projet politique : celui de fournir une culture nationale à des petits Français davantage ancrés dans des identités régionales. Ce dessein a donné naissance à ce que l’on appelle aujourd’hui le récit national. Mais la question des identités multiples est revenue interroger cette trame à la fin des années 1970 et notamment à la faveur de la présence de l‘immigration post-coloniale en France. Petit à petit, les tensions se sont accentuées, acculant l’histoire scolaire à intégrer en son récit la reconnaissance de la pluralité culturelle adossée à une mémoire coloniale.

Que faire des élèves descendants des immigrations coloniale et post-coloniale ? L’école républicaine doit-elle adapter ses programmes à leur présence ? Que faire des héritages d’une histoire douloureuse pour les uns, glorieuse pour les autres, méconnue pour beaucoup ? A partir des archives de l’Education nationale, mais aussi des textes officiels et des manuels scolaires, Laurence De Cock retrace les débats qui ont agité l’enseignement de l’histoire de la colonisation depuis les années 1980. En analysant la construction des programmes d’histoire, elle interroge l’influence des débats publics sur leur écriture et montre combien le passé colonial, progressivement saisi par le politique, bouscule en profondeur la fabrique scolaire de l’histoire. La question de l’Outre-mer se pose à la faveur également de ces débats : faut-il adapter les programmes métropolitains dans les départements d’Outre-Mer ou enseigner l’histoire de l’Outre-Mer en métropole ? La conférence reviendra sur ces tensions et ce qu’elles révèlent du lien entre le projet d’école républicaine et un universalisme rétif à la reconnaissance des différences.

Henri Eckert (Maitre de conférences en histoire contemporaine, INSPE Martinique) et Cheikh Nguirane (Maitre de conférences en études anglophones, INSPE Martinique) reviendront sur les différentes thématiques abordées dans l’ouvrage, avant de se prêter à un échange avec le public.

 

Quelques références sur le sujet

 

  • Thèses.fr – Thèses en ligne

Laurence De Cock. Le fait colonial à l’école : genèse et scolarisation d’un objet de débat public, scientifique et mémoriel (des années 1980 à 2015) : essai de socio-histoire du curriculum. Thèse en Sciences de l’éducation, Université Lyon 2, 2016

Cette thèse cherche à identifier les conditions de possibilité de modification des curricula au regard des pressions sociales. Pour cela, elle s’appuie sur un contenu d’enseignement précis : le fait colonial qui, entre les années 1980 et aujourd’hui, interroge de plus en plus le consensus national-républicain au fur et à mesure qu’il se connecte avec la question de l’immigration postcoloniale.

  • OpenEdition – Revues en SHS (libre accès)

Laurent Wirth, « L’histoire du fait colonial dans l’enseignement secondaire », Hommes & migrations [En ligne], 1295 | 2012, mis en ligne le 01 janvier 2014

Les nouveaux programmes scolaires de l’Éducation nationale au collège et au lycée traduisent l’évolution du regard que la société française porte sur son passé. Si l’histoire de la période coloniale servait autrefois à glorifier l’empire français, un changement de perspective permet aujourd’hui de traiter à la fois des civilisations précoloniales, de la colonisation et des luttes pour l’indépendance, tout en éclairant d’un jour nouveau l’histoire de l’immigration en France.

Pascale Barthélemy, « L’enseignement dans l’Empire colonial français : une vieille histoire ? », Histoire de l’éducation [En ligne], 128 | 2010

Cet article introductif propose un aperçu historiographique sur l’enseignement colonial dans l’Empire français et, plus largement, sur la « mission civilisatrice » telle qu’elle fut pensée et mise en œuvre au Maghreb, en Afrique subsaharienne, en Asie, en Océanie ou aux Antilles.

Denise Bouche, « Dans quelle mesure Paris a-t-il voulu diriger l’enseignement colonial ? », Documents pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde [En ligne], 25 | 2000

Au début du XIXe siècle, la France était le seul pays qui avait fait de l’enseignement une prérogative d’État. Sous l’Ancien Régime, l’éducation était confiée à l’Église. Ce sont les révolutionnaires qui, après avoir nationalisé les biens de l’Église firent de l’enseignement un service public dont Napoléon Ier attribua le monopole à l’Université impériale. Ce n’est qu’avec beaucoup de réticences que les régimes ultérieurs renoncèrent à ce monopole (liberté de l’enseignement primaire, en 1833 ; de l’enseignement secondaire, en 1850). Aux colonies, le gouverneur « dépositaire de l’autorité du roi » (ultérieurement et jusqu’en 1946, « dépositaire des pouvoirs de la République ») avait ainsi la direction de l’enseignement parmi ses attributions.

Gérard Vigner, « L’École Jules-Ferry, école normale de l’enseignement colonial : une formation pour apprendre à enseigner dans les colonies (1902-1912) », Documents pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde [En ligne], 55 | 2015

L’extension considérable de l’espace colonial français à la fin du XIXe siècle, conduit les autorités françaises à créer en 1894 un ministère des Colonies, chargé de donner cohérence à l’action politique et administrative de la France dans ses colonies. La même année est fondée l’École coloniale dont la mission sera de former les administrateurs et les magistrats ayant à intervenir dans les colonies. Qu’en est-il des enseignants, notamment instituteurs, que l’on commence à envoyer dans ces mêmes territoires ? Un effort particulier sera-t-il entrepris en direction d’un corps de fonctionnaires ayant à intervenir auprès des publics d’enfants indigènes ?